La Fille au sourire de perles
COMPTE-RENDU CAFE DES LECTEURS n° 46 – 2 Avril 2022
Belle affluence d’amoureux de la lecture ce samedi 2 avril !
Nous avons commencé par la lecture d ‘extraits de
- « La fille au sourire de perles » Clemantine WMARYA et Elizabeth WEIL (2019)
Clémantine Wamariya (l’auteure et narratrice) a six ans quand le conflit rwandais éclate en 1994. Avec sa sœur Claire, quinze ans, elles doivent fuir les massacres et traversent sept pays d’Afrique pour échapper à la violence. Sans nouvelles de leur famille, elles affrontent la faim, la soif, les camps de réfugiés, la misère et la cruauté pendant six ans avant d’arriver aux États-Unis.
À Chicago, les deux sœurs empruntent des chemins différents. Tandis que l’aînée, mère célibataire, a du mal à joindre les deux bouts, Clemantine, recueillie par une famille américaine, est promise à un avenir brillant. Un véritable rêve américain s’offre à elle : elle fait de brillantes études en école privée qui la mèneront jusqu’à l’université de Yale. Mais comment se reconstruire après une telle épreuve ?
Ce livre est un récit, vraiment écrit (et bien écrit) comme un roman, avec des allers et retours entre le présent aux USA et la progression de la fuite du Rwanda, par ailleurs. La recherche de la reconstruction de Clemantine est un parcours semé d’embûches et dans ce livre on apprend plein de choses, sur la colonisation belge au Rwanda, sur la vie dans les camps de réfugiés, sur le ressenti d’une enfant puis adolescente qui subit ces conditions de vie difficile. Lire ce livre au moment de la guerre en Ukraine prend une raisonnance particulière !
Fortement recommandé par Anne et Catherine.
- « Kukum » Michel JEAN (2020)
Au soir de sa vie, grand-mère (kukum, en langue innue) depuis longtemps déjà, Almanda Siméon se retourne sur son passé et nous livre son histoire, celle d'une orpheline québécoise qui tombe amoureuse d'un jeune Amérindien puis partage la vie des Innus de Pekuakami (l'immense lac Saint-Jean), apprenant l'existence nomade et brisant les barrières imposées aux femmes autochtones. Centré sur le destin singulier d'une femme éprise de liberté, ce roman relate, sur un ton intimiste, la fin du mode de vie traditionnel des peuples nomades du nord-est de l'Amérique et les conséquences, encore actuelles, de la sédentarisation forcée. Son auteur Michel Jean, descendant direct d'Almanda Siméon, est un journaliste reconnu au Québec.
Recommandé par Anne-Marie
- « Avant le gel » Henning MANKELL (2002)
Fin août 2001, dans la forêt aux abords d'Ystad, la police fait une atroce découverte: une tête de femme coupée, deux mains jointes comme pour la prière reposent près d'une bible aux pages griffonnées d'annotations.
Ce crime intervient après une série d'incidents macabres, notamment l'immolation d'animaux par le feu. Le commissaire Wallander est inquiet. Ces actes révoltants seraient-ils le prélude à d'autres sacrifices, humains cette fois, et de plus vaste envergure ?
Linda Wallander arrive à Ystad, impatiente d'endosser l'uniforme de la police. Contre l'avis de son père, dont elle partage déjà l'anticonformisme et l'irascibilité, elle se lance dans une enquête parallèle, qui l'entraîne vers une secte religieuse fanatique, résolue à punir le monde de ses péchés. Linda va bientôt le regretter...
Recommandé par Françoise D.
- « L’odyssée de Rosario » Pierre-Yves LEPRINCE (2016)
Un Français s’est acheté un terrain dans une campagne sicilienne, il a passé des mois à y reconstruire une maison. Il en sort un beau matin pour boire son café au soleil, un voisin apparaît, pose un fusil sur la table et dit : "Tu vois ce fucile ? Quand tu es arrivé, j’ai décidé de te tuer avec."
L’homme au fusil laissa la vie à son voisin, lui raconta ses aventures héroïques et patientes, pas à pas. L’histoire des travaux, des amours, des révoltes, des sagesses de Rosario R., paysan de Sicile, qui, envoyé pendant la deuxième guerre mondiale tuer des grecs à Corfoue, refuse de le faire et déserte. C’est le récit de son « odyssée » pour s’enfuir de l’île de Corfoue et rallier les Pouilles, franchir les montagnes du bout de la botte et trouver des pêcheurs ou des contrebandiers pour traverser le détroit de Messine et atteindre la Sicile, tout cela, à pied. Il raconte ses belles et ses mauvaises rencontres, tout cela émaillé de nombreuses expressions en italien.
Recommandé par Anne, Françoise B. et Catherine
- « Les chemins noirs » (1996), « Elle danse dans le noir » (2001) , « Je me souviens de tous vos rêves » (2016), René FREGNI
« Les chemins noirs » : Un homme jeune, très jeune, commet un jour sans le vouloir un acte irréparable, et dès cet instant la vie sera pour lui une longue cavale qui le mènera de Verdun à Paris, de Paris à Marseille, de Marseille en Corse , de Corse en Italie, d'Italie au Monténégro, du Monténégro en Turquie, de Turquie en Grèce, et enfin de Grèce à Marseille, dans l'immédiat après-Mai 68, où il découvrira en tant qu'aide-infirmier cet autre monde qu'est l'hôpital psychiatrique.
Telle est donc la trame picaresque du premier roman de René Frégni qui sait de quoi il parle, longtemps familier de la route de compagnons de l'aventure, et qui surtout exprime admirablement la solitude, la détresse, l'humour et l'inébranlable volonté de survivre d'un être désormais en marge.
Recommandé par Françoise D.
« Elle danse dans le noir » : Sa femme lui a dit un soir : "Je n'ai plus de désir pour toi". Le lendemain elle partait avec leur petite fille de six ans, Marilou. Le choc, terrible, le projette quatre ans en arrière, lors de la disparition de sa mère. Passé et présent se télescopent.
Dans la touffeur de l'été, René Frégni ne dort plus, son cœur bat trop fort, écrase tout. C'est un homme foudroyé qui se débat, qui s'accroche aux morts pour ne pas se pendre.
Un hymne d'amour à toutes les amoureuses.
Prix Paul Léautaud 1998
Recommandé par Françoise D.
« Je me souviens de tous vos rêves » : L'automne en Provence est limpide et bleu, ce n'est pas une saison, c'est un fruit : les touristes sont partis, la nature exulte dans une profusion de couleurs et d'odeurs. Mais si l'écrivain flâneur célèbre avec sa sensualité coutumière Manosque et la campagne provençale, il est avant tout attentif à ceux qui vivent dans les recoins de la société, les pauvres, les fous, les errants dont il se sent frère, et dont il parle sans apitoiement. Il y a Pierre, maigre silhouette traînant sur les petites routes chaque matin pour y photographier tous les rebuts qu'il trouve. Ou les co-inculpés d'un procès à Digne dans lequel l'auteur a été jadis impliqué. On trouve aussi un magnifique portrait d’un célèbre libraire de Banon, qui a transformé la minuscule librairie du village en une étonnante cité de mots, de rêves et de rencontres. Une émotion sincère et simple vibre dans chaque page, les femmes sont ici très présentes, que ce soient les servantes d'auberges longuement contemplées, ou Isabelle, " la fiancée des corbeaux ", auprès de qui l'écrivain trouve paix et bonheur.
Valérie qui a présenté ce dernier ouvrage de René Frégni se questionne pendant cette lecture, un peu éparpillée et sans fil conducteur, assez différente des autres livres de l’auteur.
- « Connemara » Nicolas MATHIEU (2022)
Hélène a bientôt 40 ans. Elle a fait de belles études, une carrière. Elle a réalisé le programme des magazines et le rêve de son adolescence : se tirer, changer de milieu, réussir. Et pourtant, le sentiment de gâchis est là, les années ont passé, tout a déçu.
Christophe, lui, n’a jamais quitté ce bled où ils ont grandi avec Hélène. Il n’est plus si beau. Il a fait sa vie à petits pas, privilégiant les copains, la teuf, remettant au lendemain les grandes décisions, l’âge des choix. On pourrait croire qu’il a tout raté. Et pourtant, il croit dur comme fer que tout est encore possible.
Connemara c’est l’histoire d’un retour au pays, d’une tentative à deux, le récit d’une autre chance et d’un amour qui se cherche par-delà les distances dans un pays qui chante Sardou et va voter contre soi.
Présenté par Françoise B. qui n’a pas été totalement convaincue par ce livre !
- « Petite » Edward CAREY (2021)
Art, amour, Révolution : le récit d’une existence hors du commun.
Née à Strasbourg en 1761, la jeune Marie Grosholz, future madame Tussaud, est employée dès son plus jeune âge comme apprentie par un sculpteur sur cire. Lorsque le duo devient célèbre à Paris pour ses réalisations, Marie a pour modèles les plus grandes personnalités de l’époque : Voltaire, Rousseau, Benjamin Franklin, etc. Bientôt elle est accueillie à la Cour où elle prodigue des leçons de sculpture à la princesse Élisabeth, sœur du roi. En 1789, la capitale entre en ébullition, la foule exige des têtes. C’est le début d’une incroyable décennie pour Marie qui, échappant de peu à la guillotine, se voit chargée d’exécuter les masques mortuaires de ses amis les plus proches (Louis XVI), comme de ses ennemis les plus acharnés (Robespierre).
Avec ce récit palpitant, illustré de magnifiques dessins de l’auteur, Edward Carey nous fait entrer dans l’intimité d’une femme au destin exceptionnel.
Recommandé par Cécile.
- « Sérotonine » Michel HOUELLEBECQ (2019)
« Mes croyances sont limitées, mais elles sont violentes. Je crois à la possibilité du royaume restreint. Je crois à l'amour » écrivait récemment Michel Houellebecq.
Le narrateur de Sérotonine approuverait sans réserve. Son récit traverse une France qui piétine ses traditions, banalise ses villes, détruit ses campagnes au bord de la révolte. Il raconte sa vie d'ingénieur agronome, son amitié pour un aristocrate agriculteur (un inoubliable personnage de roman, son double inversé), l'échec des idéaux de leur jeunesse, l'espoir peut-être insensé de retrouver une femme perdue. Ce roman sur les ravages d'un monde sans bonté, sans solidarité, aux mutations devenues incontrôlables, est aussi un roman sur le remords et le regret.
Patrick poursuit son cycle Houellebecq !
- « Anne de Green Gables » Lucy Maud MONTGOMERY (2022)
Nouvelle traduction de "Anne, la maison aux pignons verts".
Anne Shirley est une petite fille curieuse, pleine d'énergie, souvent perdue dans ses pensées, parfois d'une gravité solennelle, sans aucun doute intemporelle. Difficile de résister à ce petit bout d'humanité de onze ans parfaitement imparfaite, héroïne d'une série de romans qui a su conquérir des millions de lecteurs à travers le monde, "Anne de Green Gables", écrit par Lucy Maud Montgomery, et dont le premier tome parut en 1908.
Orpheline à l'esprit vif, à l'imagination sans bornes, Anne se retrouve par erreur chez Marilla et Matthew Cuthbert qui attendaient un garçon pour les aider à la ferme. Féministe involontaire, romantique impénitente, elle est impulsive, dramatique, maligne, drôle, et telle une authentique naïve, elle va bousculer le calme et la monotonie de la vie à Green Gables, en semant partout joies et rêveries, en dénichant la beauté dans les moindres recoins, en ne s'exprimant qu'en points d'exclamation, même dans "les affres du désespoir". Parce que l'existence d'Anne a aussi une face sombre, hantée par la mort de ses parents et les abandons, qui lui donne son énergie folle, parfois hallucinée, et qui rend son idéalisme et son indignation si poignants et si convaincants. Si le regard d'Anne transcende le monde sur lequel il se pose, Anne de Green Gables, c'est la transformation magique, presque mystique, que seul l'amour peut opérer sur les hommes et les femmes. C'est l'histoire d'une petite fille qui parvient à se faire aimer de tous.
Écrit par une femme à une époque où tout était contre elle, refusé par de nombreux éditeurs, avant d'être enfin publié avec un succès immédiat, adapté des dizaines de fois "Anne de Green Gables" de Lucy Maud Montgomery est un hymne à la joie, à la persévérance et au pouvoir de l'imagination.
Recommandé par Evelyne.
- « Une immense sensation de calme » (2018), « Le sanctuaire » (2019) Laurine ROUX
« Une immense sensation de calme » : Alors qu'elle vient d'enterrer sa grand-mère, une jeune fille rencontre Igor. Cet être sauvage et magnétique, presque animal, livre du poisson séché à de vieilles femmes isolées dans la montagne, ultimes témoins d'une guerre qui, cinquante plus tôt, ne laissa aucun homme debout, hormis les « Invisibles », parias d'un monde que traversent les plus curieuses légendes.
Au plus noir du conte, Laurine Roux dit dans ce premier roman le sublime d'une nature souveraine et le merveilleux d'une vie qu'illumine le côtoiement permanent de la mort et de l'amour.
« Le sanctuaire » : Une famille a trouvé refuge en pleine montagne, où elle tue les oiseaux : ils seraient à l'origine d'un mal ayant conduit l'humanité à son extinction. Tandis que la mère pleure et chante son existence passée, le père seul s'aventure aux confins de leur « sanctuaire », d'où il rapporte tout ce qu'il trouve pour assurer la survie des siens. Mais le monde est-il vraiment devenu ce qu'il en dit ? Est-il jonché de cadavres qui pourrissent le long des chemins ? Comment être certain des motifs qui le conduisent à cloîtrer sa famille, à dispenser à ses filles un entraînement quasi militaire et à se montrer chaque jour plus imprévisible et brutal ? Gemma, la plus jeune des deux filles, va peu à peu transgresser les limites du « sanctuaire » - et avec elles, la loi de ce père qu'elle admire plus que tout. Ce sera pour rencontrer un vieil homme sauvage qui vit entouré de rapaces. Parmi eux, un aigle qui va fasciner l'enfant...
Écrit en 2019, avant qu'une pandémie de coronavirus conduise au confinement de la moitié de l'humanité, « Le Sanctuaire » déploie et sublime ce qui faisait déjà la puissance d' « Une immense sensation de calme » : une ode à la souveraineté de la nature et une compassion pour nous autres, humains, qui devons sans cesse lutter pour notre survie.
Chaleureusement recommandés par Anne et Catherine
Enfin nous avons échangé de plusieurs livres déjà présentés dans les derniers compte-rendus, au fur et à mesure de la lecture d’autres participants…
Prochain café des lecteurs : samedi 7 mai
Et d’ici là, faites de belles lectures !
A découvrir aussi
Inscrivez-vous au blog
Soyez prévenu par email des prochaines mises à jour
Rejoignez les 104 autres membres